Costume du râleur de rigueur et badge du MFE (Mauvaise Foie Evidente) au revers du veston, laissez-moi vous prouver qu’une sortie ciné peut, de nos jours, être la pire des expériences humaines. Voisins bruyants, projectionnistes décérébrés, publicités criardes et odeurs suspectes, rien n’est épargné au courageux cinéphile, innocente victime en quête de culture et de divertissement. Mettons de côté les embûches qui vous guettent sur le trajet vers la salle, le mal de dents qui vous prend la tête ou votre chère moitié qui n’arrive jamais à l’heure même si vous l’invitez. Concentrons-nous sur toutes ces petites douleurs dignes d’un orchestre de scies musicales bien aiguisées, mettant votre patience légendaire à rude épreuve, vous faisant rêver à une soirée cocooning devant Thalassa. Voici une liste non exhaustive, et dans le désordre, de 5 raisons pour rester à la maison !
L’ACCRO DU PORTABLE
L’oreille greffée sur l’écouteur ou les doigts scotchés sur le clavier, l’accro du téléphone portable apparut dans les salles lorsque ce petit appareil, bijou de technologie au demeurant fort pratique, envahit nos existences au point de se rendre pratiquement indispensable. Enfermé dans une bulle d’irrespect, il (ou elle) ne peut s’empêcher de manipuler son joujou extraordinaire. Vérifiant toutes les 5 secondes ses sms, ses mails ou sa messagerie comme pour se rassurer de son appartenance au monde moderne, l’accro du portable oublie rapidement la raison de sa présence et se sent comme chez lui. Peu importe le démarrage du film et la salle plongé dans le noir, répondre à l’éternelle question « Téou ? » est plus important que tout. Plus tard, il rattrapera sa séance gâchée en mattant le film en streaming. Sur son téléphone portable.
LES PIPELETTES
Duo de la parlotte, binome du bla-bla, les pipelettes sont généralement composées d’au moins deux personnes. Question de logique. Ces mordues de l’échange verbal ont un besoin viscéral de parler de tout et de rien, partout, tout le temps, par tous les temps. Qu’importe le film, son sujet où les autres spectateurs, les pipelettes braveront les interdits pour échanger sur la pluie, le beau temps, les futures vacances, le climat infernal au boulot, la compet’ de basket de Kevin, le 4×4 acheté en leasing ou les kilos à perdre de Jean-Pierre. La vie, quoi ! Bien sûr, vous ne pouvez totalement leur en vouloir. Parlez de tout et de rien avec des proches, cela vous concerne aussi. Sauf qu’ici et en ce moment, vous avez payé votre place au plein tarif pour voir ce film que vous attendiez tant, pas pour connaître la vie intime de vos voisins de salle ! Essayez donc de les faire taire ou de leur suggérer le café du commerce le plus proche, les pipelettes auront toujours le dernier mot !
LE COMMENTATEUR CINÉPHILE
Aussi bavard mais moins hors-sujet que les pipelettes, le commentateur cinéphile est, tout comme vous, un grand amateur de films. Qu’il soit geek, abonné aux Cahiers du Cinéma ou cinéphage, il a un gros défaut : il ne peut s’empêcher de les comenter en public, à la maison comme en salle pour prouver à son voisinage qu’il connait chaque scène, chaque plan, chaque dialogue mieux que quiconque. Généreux, il se fera une joie de gâcher votre séance en expliquant la moindre image à la manière d’un conférencier. Ses proches qui l’accompagnent sont les premiers à en faire les frais. Ils se repèrent facilement puisqu’ils accompagnent les commentaires de notre expert par des « chhhuuuuuttt » tous aussi bruyants, si ce n’est plus !
L’INSTABLE DES PIEDS
Connu aussi sous les sobriquet du « démangé de la guibolle », « footeux contrarié » ou « très très grand nerveux », il ne peut s’empêcher de croiser et décroiser les jambes tout au long de la séance, heurtant le dossier de votre fauteuil et labourant votre dos par la même occasion. Un vif demi-tour vers votre agresseur, accompagné du regard noir d’un Terminator, devrait suffir à le calmer au moins pour un moment. Bien sûr, la proximité d’une rangée à l’autre aggrave souvent les choses. Et l’ennui ou le malaise que provoquent certains films enveniment la situation. C’est vrai, l’instable des pieds a parfois des excuses. N’empêche qu’il vous fait déjà regretter le moelleux de votre canapé…
LE POP CORN ADDICT
Nommé aussi « gros mangeur de pop corn » ou « l’ogre du maïs soufflé », il reste toujours la grande menace du cinéphile ou du cinéphage, soucieux de voir un film dans les meilleurs conditions possibles. Qui n’a pas un jour souffert des « crunchs » intempestifs de son voisin boulottant le contenu de son sceau de pop corn ? Qui ne s’est pas noyé sous les projections de miettes venant du fauteuil voisin ? Pratiquemment indissociable des premières séances de l’histoire du cinématographe, le Pop Corn Addict ferait presque partie du décor. Remplacez le pop corn par un paquet de m & m’s ou par des cacahuètes grillées, la terreur qu’il instaure est identique. Et à défaut de vous proposer un peu de sa pitance, il partagera sans problèmes le bruit infernal engendré par sa gourmandise ! Alors, me direz-vous, comment le reconnaître pour mieux s’en éloigner ? À son sceau démesuré, rempli à ras bord de maïs soufflé. À ses doigts collants, ses joues prêtes à craquer et son regard dément de « serial eater ». Il ne ressemble à personne, si ce n’est à vous-même… ou à moi ! Ben oui, j’adore le pop corn.
Pour conclure et ajouter un peu plus de vinaigre à tant de « souffrance », je pourrais évoquer les sonneries de portable intempestives, les retardataires qui vous bousculent dans le noir et vous gâchent la vue, les salles surchauffées en plein été ou glaciales en pleine saison hivernale, les files d’attente interminables, les grêves surprises de l’EDF (authentique !) ou même les projectionnistes qui envoient la dernière bobine du film en début de projection (toujours authentique !)… Il me faudrait probablement plus d’une page pour étaler toutes ces petites contrariétés du quotidien, pas bien graves mais tellement pénibles.
Découvrir un nouveau film en salle – tout comme redécouvrir un grand classique – reste pourtant l’un des petits plaisirs de notre monde moderne, à vivre en solitaire ou à partager à plusieurs. Un jour, c’est promis, je vous donnerai ma liste de tout ce qui me fait préférer la pénombre d’une salle obscure à mon intérieur (trop) cosy. Si je survis à une prochaine séance 🙂
Crédits photos : © Getty / © Warner Bros Company
Très bonne idée ce billet, tu m’as bien fait rire 😀 C’est tellement vrai !
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Merci fidèle Potzi 😉
Oui, tout est vrai ! Et j’en ai bien d’autres à raconter, comme beaucoup d’ailleurs… On doit être de vrais mordus de ciné pour continuer d’y aller coute que coute 😀
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Oui je pense qu’on est accroc 🙂 En même temps, rien ne vaut la découverte d’un film sur grand écran mais c’est vrai que certaines personnes ont le don pour «gâcher» un peu le plaisir !
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Absolument ! Un film doit se voir en salle, ne serait-ce qu’une fois si c’est un classique ou lors de sa sortie si c’est une nouveauté… Un jour, il y avait un môme près de moi qui passait l’intégralité de la séance à mater son portable. J’ai explosé et il a rangé sagement son gadget… Il y a un moment de ça, en allant voir L’Éveil avec De Niro et Robin Williams, cette andouille de projectionniste a passé la dernière bobine du film avant les autres. On a tous râlé auprès du cinéma… qui a refusé de nous rembourser la séance !… Une autre fois, une grêve surprise de l’EDF a stoppé net la projection du film que j’étais venu voir, après les 20 premières du dit film, L’Étoffe Des Héros. Là, pour le coup, les responsables de la salle nous ont tous offert un avoir pour une autre séance à la date de notre choix. Mais depuis, à chaque fois que je revois le film, je pousse un grand soupir de soulagement quand les 20 premières minutes sont passées 🙂
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