Humeur : des espoirs et déceptions #7

Il y a bientôt 13 ans disparaissait une brillante actrice au regard profond et à la voix grave. Marie Trintignant, fille d’un couple d’artistes majeurs du cinéma français, elle-même comédienne singulière et envoûtante. Alors qu’une journée est consacrée à la femme, je tenais à la saluer. Pour ne pas l’oublier.

Je vous salue Marie

Il y a quelques jours, un tribunal a jugé bon de ne pas poursuivre un jeune rappeur pour les propos hautement misogynes – et ignobles – de l’un de ses titres. Dans ce morceau de poésie moderne, l’artiste rebelle y évoque la femme de ses rêves, soit une idiote qui aime les coups, lui ordonnant de se taire sous la menace de la “marie-trintigner”. On admirera au passage l’intelligence subtile du bon mot qui aura vite fait de se démocratiser dans toutes les cours de récré, si ça n’est pas déjà le cas hélas…

Sous prétexte de défendre la création artistique et l’expression d’une jeunesse en manques de repères, le rappeur a été relaxé, soutenu par une certaine presse intellectuelle politiquement correcte, prônant comme argument inaltérable la liberté d’expression de notre riante contrée. Adjugé, affaire suivante.

Marie Trintignant était une femme, comme tant d’autres. Pas un simple jeu de mots moisi, issu de l’esprit étroit d’un pseudo artiste plus soucieux de faire parler de lui que d’exprimer un mal de vivre à grands coups de violence verbale.

Janis et John de Samuel Benchetrit avec Francois Cluzet, Marie Trintignant, 2003
Marie Trintignant dans JANIS ET JOHN de Samuel Benchetrit, l’un de ses derniers rôles avec Francois Cluzet.

2 grands yeux noirs sous une frange foncée, ce beau regard mêlant ironie et mélancolie, cette façon si sensuelle d’occuper l’espace et l’écran. Et cette voix cassée qui déchirait le silence et vous étreignait le cœur.

Ne cherchez pas plus loin, j’ai toujours été sous le charme de cette belle actrice à la carrière courte mais singulière. Cette manière de s’impliquer dans chaque rôle, sans artifices ni plan de carrière. Il y a bien sûr son tout premier rôle à 16 ans, aux côtés de Patrick Deweare dans SÉRIE NOIRE. Ses interprétations marquantes chez Chabrol, Pierre Salvadori ou chez sa mère Nadine Trintignant.

Je me souviens de son apparition lumineuse dans le méconnu L’ÉTÉ PROCHAIN. De sa présence sensuelle et désarmante de naturel dans NUIT D’ÉTÉ EN VILLE de Michel Deville, de sa nudité malicieuse et sans provocation.

marie-trintignant

Toujours avec sa mère, Marie Trintignant évoquait les combats des femmes à travers les personnages de Victoire ou Colette pour la télévision. De beaux rôles pour une belle âme qu’une série de coups a éteint à tout jamais.

Sous couvert de défendre une certaine idée nauséabonde de la création artistique, on balaie d’un simple revers la mémoire des disparus. Défendre les idées et l’expression, certes. Mais à quel prix ? Pourquoi descendre dans la rue pour louer la tolérance lorsque certaines idées défendues invoquent la violence et la bêtise humaine ? Étrange pays où le politiquement correct n’empêche pas le manque de responsabilité.

Ce jour est à l’honneur des femmes. Toutefois, certains mots les bafouent encore au quotidien, en 2016, dans une nation dîtes civilisée. Et au delà des mots, des actes sans excuses broient des vies.

À certaines phrases scandées comme autant d’expressions machistes dénuées de créativité, je préfère la chanson de Renaud qui disait “Femme je t’aime parce que tu n’vas pas mourir à la guerre”. Je préfère me souvenir de Marie Trintignant.

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2 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. potzina dit :

    Cet Orelsan est une petite m****e. Ce type écrit qu’il va faire avorter sa meuf à l’Opinel et tout un tas de cloportes applaudissent. Quand je pense que des femmes le soutiennent, ça me donne la nausée.
    Comme tu dis, on vit dans un drôle de pays. Je suis pour la liberté d’expression mais l’incitation à la haine et à la violence me reste en travers de la gorge. En son temps NTM avait été condamné pour avoir inciter à commettre des actes de violence envers la police. Il semblerait que dans notre pays la vie d’une femme ait moins de valeur que celle d’un flic…

    Il y a quelques années je suis allée visiter le Père Lachaise et notre guide, après la visite historique, nous a fait une visite « people » qui nous a conduits sur la tombe de Marie Trintignant. C’est une sépulture simple sur laquelle était posée un tournesol artificiel. Bertrant Cantat était sorti de prison quelques mois auparavant. J’étais bouleversé de la savoir là alors que lui prenait déjà le frais. Je ne suis pas pour une vraie perpétuité (et encore, ça dépend des cas) mais là… Il la tue à coup de poings et 5 ans plus tard il est dehors.
    Tu braques un fourgon, tu te manges 10 ans. Tu tues une femme, tu sors au bout de 5 ans. Cherchez l’erreur… 😦

    Désolée de m’être autant emballée mais c’est un sujet qui me fait bondir.

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    1. Non Potzi, ne t’excuses pas. Je te comprends, je ressens la même chose… Comme le disait Bill Shakespeare « Il y a quelque chose de pourri… ». Moi aussi je ne comprends pas que l’on laisse faire de telles choses… Ça n’est pas qu’un texte, c’est une incitation à la haine. Et on ne fait rien, appuyé par une certaine presse et une opinion dîte libérale. Assez déprimant… Ça m’a révolté, il fallait que j’en parle. Merci pour ton message.

      Aimé par 1 personne

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