SPLIT de M. Night Shyamalan

L’histoire

De nos jours aux États-Unis, la jeune Casey (Anya Taylor-Joy) et deux de ses amies sont enlevées et séquestrées par Kevin Wendell Crumb (James McAvoy), un désaxé. Cherchant à s’enfuir, les 3 jeunes filles découvrent que leur ravisseur change régulièrement de personnalité et de comportement, d’une étrange femme affable à un espiègle petit garçon de 9 ans en passant par un inquiétant psychopathe…

Je est un autre

Depuis THE VISIT, son précédent film, M. Night Shyamalan est revenu aux affaires. Comprenez qu’après un démarrage en fanfare, avec LE 6ème SENS et INCASSABLE, et un sérieux « coup de mou » l’entraînant vers d’autres voies peu convaincantes (LE DERNIER MAÎTRE DE L’AIR, AFTER EARTH…), celui qu’on a un temps comparé à Spielberg ou Hitchcock redevient un cinéaste sur lequel on peut compter. Son nouvel opus en est encore la preuve.

SPLIT nous entraîne vers un troublant et vertigineux voyage en terre inconnue: celle du cerveau humain, source de nombreuses interrogations puisque l’on sait qu’un individu n’en exploite qu’une faible partie. Se basant sur un véritable – bien que controversé – mal d’ordre psychologique, le trouble dissociatif de la personnalité, le film explore une hypothèse à la fois intrigante et effrayante: qu’arriverait-il si un homme, sujet à ce mal étrange, se laissait progressivement dominer par la plus monstrueuse de ses multiples personnalités ?

Fort heureusement, SPLIT reste avant tout un thriller. Il ne s’agit pas ici de donner une conférence sur une forme poussée de schizophrénie mais de proposer au public un divertissement (très) anxiogène et captivant. Shyamalan y parvient avec facilité, impliquant le public dès les premières minutes en dégraissant son récit d’informations susceptibles de ralentir l’intrigue.

Avec le talent d’un conteur entraîné, le cinéaste pose les bases de son film et les personnalités de ses principaux protagonistes en peu de temps, à l’aide de rapides mais efficaces flashbacks qui viennent éclairer l’histoire. Face à un personnage central des plus complexes, Shyamalan a privilégié une certaine simplicité du récit (3 jeunes filles sont enlevées par un détraqué, comment vont-elles s’en sortir ?) pour mieux nous plonger dans un cauchemar des plus éprouvants.

L’atout-maître de SPLIT vient de la singularité de son « anti-héros ». Difficile de prévoir les rebondissements de l’intrigue face à un individu aussi… multiple ! Tour à tour inquiétant, drôle, touchant et particulièrement effrayant, James McAvoy campe ce rêve d’acteur – plusieurs rôles en un seul – avec une maestria impressionnante. Oubliez le jeune Professeur Xavier des récents X-Men, l’acteur incarne ici un être terrifiant avec une conviction troublante, mélange perturbant d’outrance et de subtilité dans les attitudes et les expressions.

Chacune de ses apparitions suscite l’angoisse et place le spectateur dans la position d’une de ses victimes. Face à lui, l’épatante et convaincante Anya Taylor-Joy révèle un indéniable talent. Rôle difficile pouvant tomber facilement dans le « déjà-vu » de la pauvre proie apeurée ou de la rebelle agressive, la jeune actrice impose avec simplicité et naturelle son rôle d’adolescente abimée par la vie.

Sans être le cœur du récit, l’affrontement entre ces deux êtres portant le poids d’un lourd passé donne à SPLIT un supplément d’âme faisant souvent défaut à bon nombre de thrillers psychologiques. Le personnage de Casey semble être la seule des trois jeunes filles à comprendre la complexité de leur bourreau. Shyamalan garde judicieusement des zones d’ombre quant à l’enfance de ces deux adversaires mais on comprend au détour de souvenirs que cette période de leurs vies respectives les a marqué à vie.

Sortant à peine de l’enfance, Casey a toutefois la possibilité de ne pas basculer dans la démence, là où Crumb paraît irrécupérable. À la fois innocente et d’une grande maturité, la jeune fille renvoie au désaxé l’image d’une rédemption tardive et inaccessible. Quant à Crumb, il offre à Casey le spectacle cauchemardesque d’une folie destructrice qu’elle peut encore éviter. Un étrange et éprouvant jeu de miroirs où le plus fort des deux n’est pas celui qu’on croit…

Prenant mais tendu comme une corde à piano, SPLIT est un excellent thriller psychologique, déconseillé aux âmes trop sensibles. Jouant plus sur la peur et la déstabilisation que sur l’horreur pure, le dernier film de M. Night Shyamalan est à ne pas manquer si vous êtes adeptes d’angoisse et de réflexion croisées.

NB: À ne pas manquer en toute fin de film l’apparition surprise d’un autre personnage de la « galaxie Shyamalan ». Je vous laisse ici le soin de le découvrir même si cela enflamme déjà la toile de toutes les spéculations… 


SPLIT (2016) de M. Night Shyamalan.
Avec James McAvoy, Anya Taylor-Joy, Betty Buckley, Jessica Sula, Haley Lu Richardson…
Scénario: M. Night Shyamalan. Musique: West Dylan Thordson.

Crédits photos: © Universal Pictures


Bande-annonce

4 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. manU dit :

    Je partage totalement ton enthousiasme mais je ne serai pas parvenu à le dire aussi bien !
    J’aime beaucoup ce réalisateur même s’il est inégal.
    Quant à la jeune Anya Taylor-Joy, elle ne devrait pas en rester là à mon avis…

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    1. Merci Manu !
      Oui, bien d’accord en ce qui concerne Shyamalan. Le bonhomme est inégal mais ses deux derniers films, SPLIT et THE VISIT, m’ont convaincu personnellement… Quant à Anya Taylor-Joy, bien d’accord également. Elle a tout d’une grande 😉

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  2. J’ai bien eu envie de le voir mais impossible de trouver une version originale dans mon coin, j’attendrais donc le DVD en espérant éviter d’ici là les spoilers

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    1. Oui, perso je l’ai vu en VF mais je te comprends. En tous les cas, le film vaut vraiment le détour. Éprouvant pour les nerfs mais très bonne toile pour tous les cinéphiles, les Girlies y compris 😉

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