5 raisons de revoir FOG

Devenu un cinéaste culte depuis bientôt 40 ans, à la sortie d’HALLOWEEN en 1978, John Carpenter s’est imposé comme un modèle pour une jeune génération de cinéastes d’épouvantes, s’accaparant son minimalisme pour le meilleur (THE VISIT) et pour le pire (IT FOLLOWS). Dans la filmographie du réalisateur, les films NEW YORK 1997 ou THE THING reviennent le plus souvent lorsque l’on évoque sa carrière.

Réalisé en 1980 et conspué par Carpenter lui-même, qui considère le film comme une œuvre mineure dans son parcours, FOG (ou THE FOG en VO) s’avère pourtant une réussite de la série B d’épouvante. Voilà au moins 5 raisons de le revoir à l’approche des fêtes d’Halloween.

NB: Sans revenir sur l’éternel polémique du « remake or not remake » et si vous n’avez jamais vu ce film, je vous invite grandement à préférer FOG l’original au lamentable remake réalisé en 2005 et transformé en un slasher pour ados. Vous voilà prévenus…


Pour son récit d’épouvante
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FOG commence par une vieille légende, racontée la nuit au coin d’un feu de camp par un vieux pêcheur à de jeunes enfants. Il y a de cela plus d’un siècle, la petite ville côtière d’Antonio Bay, en Californie du nord, fut le théâtre d’un épouvantable drame. Pris dans un mystérieux brouillard, un bâteau de lépreux fit naufrage près du rivage et l’équipage entier périt. Mais derrière ce qui apparaît comme un simple accident dramatique se cache une vérité monstrueuse.

Au début des années 80, alors qu’Antonio Bay s’apprête à fêter son centenaire, une série d’étranges incidents se produit alors qu’un brouillard lumineux se répand sur la ville. Pris au piège des fantômes des naufragés, quelques habitants luttent pour leur survie…

Derrière la simplicité apparente du récit, John Carpenter rend un bel hommage aux contes et légendes gothiques qui font partie de notre culture. Il réveille aussi l’enfant friand d’histoires effrayantes qui dort en chacun de nous. Avec un talent certain pour l’angoisse, distillée comme un goutte-à-goutte mortel, le cinéaste signe avec FOG une réussite de l’épouvante, classique mais très efficace.

Pour son angoisse maximum avec peu d’effets
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Certes, cette économie de moyens est certainement liée au petit budget de FOG (1 Million de dollars) mais l’une des réussites du film est qu’elle n’est jamais perceptible. S’appuyant sur des ressorts classiques de l’épouvante – la brume, la nuit, les silhouettes fantomatiques et inquiétantes – Carpenter parvient à installer un lourd climat d’angoisse progressif, filmant comme personne un quotidien banal qui bascule dans l’étrange.

L’idée de la légende contée la nuit au coin du feu n’est pas innocente. Le cinéaste nous prend la main pour nous plonger doucement dans un climat de peur,  ancré dans le plus banal des quotidiens : des lumières qui s’allument sans raisons, des objets qui se brisent inexplicablement, un brouillard lumineux qui vient d’on ne sait où…  John Carpenter prend le temps d’installer son film et de planter le cadre pour mieux nous imprégner et nous mettre en condition.

Pour ses références à la Hammer et à Hitchcock

2 évidentes références me sont venues à l’esprit en revoyant FOG : l’une est liée aux œuvres gothiques de la Hammer, célèbre maison de production britannique spécialisée dans les films d’épouvante, principalement des années 60 et 70; et l’autre fait allusion à Alfred Hitchcock, le célèbre maître du suspense avec des films comme PSYCHOSE ou VERTIGO.

FOG se base sur une vieille légende de la fin du XIXème siècle, une malédiction qui, si elle prend place aux États-Unis, a tout du récit gothique anglais dont les studios Hammer étaient friands. Les fantômes vengeurs du navire coulé, dont on ne distingue que les silhouettes menaçantes, pourraient tout aussi bien provenir d’un ancien grimoire perdu et d’un village de Cornouailles.

Grand admirateur d’Alfred Hitchcock, Carpenter y fait allusion au moins par 2 fois dans FOG. Tout d’abord en tournant à Bodega Bay sur les lieues même où Hitch filma LES OISEAUX en 1963. Puis en donnant à Janet Leigh, héroïne tragique de PSYCHOSE (et mère de Jamie Lee Curtis), l’un des rôles principaux du film. Une façon comme une autre de rendre hommage à Sir Alfred.

Pour le soin apporté à la photographie

Malgré son petit budget, John Carpenter voulut soigner la photographie de FOG et magnifier l’image. Il opta tout d’abord pour un format large anamorphosé, proche du Cinémascope, afin de donner une ampleur peu usitée dans ce genre de production et tirer parti au maximum de la beauté des décors naturels du film.

Carpenter s’adressa également, en tant que directeur de la photographie de FOG, au réputé Dean Cundey qui avait déjà travaillé avec lui sur HALLOWEEN et reviendra sur THE THING et JACK BURTON.

Au cours de sa prolifique carrière, Cundey travailla également pour Steven Spielberg sur HOOK et JURASSIC PARK, ou pour Robert Zemeckis sur À LA POURSUITE DU DIAMANT VERT, la trilogie RETOUR VERS LE FUTUR ou LA MORT VOUS VA SI BIEN.

Pour sa critique sociale

Cinéaste engagé, attaché à certaines valeurs (avec ses références régulières aux western depuis ASSAUT) mais rebelle au système et au pouvoir, John Carpenter n’oublie jamais de glisser dans ses films, ici et là, quelques critiques cinglantes envers les États-Unis. Si des œuvres comme NEW YORK 1997 et surtout THEY LIVE (INVASION LOS ANGELES en vf) sont explicitement des attaques virulentes contre les dérives de notre société contemporaine, FOG n’oublie pas de bousculer les apparences trompeuses et bien-pensantes de l’Amérique.

Plus particulièrement à travers le personnage de la maire d’Antonio Bay (jouée par Janet Leigh), un temps plus soucieuse des festivités du centenaire de la petite ville que des évènements étranges qui secouent sa communauté, Carpenter nous parle d’une ville tirant sa prospérité actuelle sur un crime passé. La vengeance des sacrifiés de l’Elizabeth Dane, le navire ayant tragiquement sombré un siècle plus tôt, apparaît dès lors comme un « juste » retour des choses quant aux secrets que cache la cité portuaire.

Derrière l’épouvante et l’horreur se dévoile l’allusion à peine masquée d’une nation fondée sur le sang et la cupidité. FOG, film socialement engagé ? Ce qui est sûr, c’est que derrière la forme, le fond n’est pas négligé.EnregistrerEnregistrer


FOG (1980) de John Carpenter.
Avec Adrienne Barbeau, Jamie Lee Curtis, Tom Atkins, Janet Leigh, Hal Holbrook, Nancy Loomis…
Scénario : John Carpenter et Debra Hill. Musique : John Carpenter.

Crédits photos : © AVCO Embassy Pictures (États-Unis)


bande-annonce

BONUS
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La bande originale à écouter sur Deezer en cliquant ce lien.EnregistrerEnregistrer

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6 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. Isa Poitou dit :

    Je me dis toujours qu’il faut que je voie plus de films de John Carpenter, il a une sacrée filmo :)!

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  2. Oui Isa et depuis une bonne quarantaine d’années ! Sans chercher à t’influencer, je pense que tu peux voir ses films au moins jusqu’à son très bon remake du VILLAGE DES DAMNÉS en 1995. Après, à mon humble avis, il y a une perte de qualité… Mais dans mon top 5, tu peux voir NEW YORK 1997, HALLOWEEN, THE FOG, STARMAN et THE THING (très gore mais excellent)

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  3. skygarulfo dit :

    J’ajouterais « L’antre de la folie » dans sa bonne filmo, très étrange et barré mais aussi très sympa

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    1. Pourquoi pas. Mais ça n’engage que toi.

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  4. le Bison dit :

    Ah, ça me fait plaisir de lire sur ce film… Il est grandiose, l’un des meilleurs Carpenter. Bien sûr, il y a au-dessus du lot de sa filmographie The Thing – et dans un tout autre genre NY 97 – mais Carpenter avait l’art de provoquer des frissons avec peu de choses, un brouillard – ou par exemple avec une vieille voiture nommée Christine. Fog, j’en garde une douce nostalgie, un autre temps, celui où je regardais plus jeune ce genre de films.

    Et si le réalisateur considère cette oeuvre comme mineure, moi je l’aimbe bien, parce que c’est un film d’ambiance, ambiance angoissante, un film d’atmosphère, atmosphère oppressante…

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    1. J’ai vu moi aussi la plupart des films de Carpenter quand j’étais plus jeune. Mais je pense qu’on peut toujours les revoir aujourd’hui 😉

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