Le nom de David Mamet ne dira peut-être pas grand chose pour certains d’entre vous. Et pourtant, s’il s’est fait plus discret depuis quelques temps, il est associé à de nombreuses réussites du cinéma hollywoodien de ces 40 dernières années.
Dramaturge, producteur et réalisateur américain d’origine russe, Mamet fut révélé dans les années 80 pour les scénarios de nombreux films marquants : LE FACTEUR SONNE TOUJOURS DEUX FOIS de Bob Rafelson, LE VERDICT de Sidney Lumet ou LES INCORRUPTIBLES de Brian De Palma,

Il fut l’auteur de plusieurs pièces à succès pour le théâtre, comme GLENGARRY GLEN ROSS ou AMERICAN BUFFALO. Lauréat d’un Prix Pullitzer, il fut plusieurs fois nommé aux Oscars pour ses scénarios et aux Tony Awards pour ses pièces.
Mamet ne se contenta pas d’écrire des récits pour le cinéma. Il passa à la réalisation à la fin des années 80 et mis-en-scène plus de 10 films jusqu’en 2013. Par le biais de thrillers psychologiques où la manipulation des personnages principaux rejoint celle des spectateurs, David Mamet est devenu un spécialiste du polar raffiné, avec une touche de violence et des personnages fouillés et fascinants.

À travers 2 de ses films parmi mes préférés, je vous invite à (re)découvrir cet auteur talentueux qui mériterait amplement une rétrospective à la Cinémathèque ou un cycle sur une chaîne comme Arte.
ENGRENAGES (HOUSE OF GAMES – 1987)
Margaret Ford (Lindsay Crouse), une psychiatre réputée à la vie solitaire et rangée, cherche à venir en aide à l’un de ses patients. Ce dernier ne peut payer une certaine somme d’argent à Mike (Joe Mantegna), le tenancier d’un tripot où il joue régulièrement. Se rendant à la maison de jeux pour rencontrer Mike et payer la dette, Margaret est rapidement fascinée par l’univers du jeu fait de manipulations…
Première réalisation de David Mamet, ENGRENAGES (à ne pas confondre avec la série du même nom) est une véritable mise en abîme, plaçant le spectateur au cœur d’un récit trouble où la manipulation est une manière, dans la vie comme pour le jeu, de « redistribuer les cartes » et d’obtenir ce que l’on souhaite des autres.
Se croyant psychologiquement plus forte que ses contemporains, de par sa profession et sa grande expérience de l’âme humaine, le personnage de Margaret plonge la tête la première dans un piège des plus habiles, révélant au passage ses propres névroses.
Choisissant volontairement de ne pas diriger de stars mais s’entourant d’acteurs confirmés – avec en tête les brillants Lindsay Crouse et Joe Mantegna – David Mamet propose une œuvre où l’apparente fluidité de la réalisation cache un récit fait de chausses-trapes, de fausses pistes et de pièges implacables.
Premier film maîtrisé et prenant, ENGRENAGES se savoure comme un conte dont on découvre progressivement les ficelles sans se douter que nous sommes nous aussi manipulés.
Bande-annonce
LA PRISONNIÈRE ESPAGNOLE (THE SPANISH PRISONER – 1997)
Joe Ross (Campbell Scott), un jeune et talentueux ingénieur, vient d’inventer une formule révolutionnaire, source certaine de fortune pour la société qui l’emploie. Au cours d’un séminaire d’entreprise aux Caraïbes, il sympathise avec Jimmy Dell (Steve Martin), un excentrique milliardaire. Celui-ci lui demande de ramener un colis à son retour à New York…
Derrière ce titre énigmatique se cache la désignation d’une arnaque aux rouages machiavéliques. S’aventurant à nouveau dans les méandres de la manipulation et de l’escroquerie, David Mamet s’aventure ici dans les coulisses de l’espionnage industriel.
Comme pour le personnage de Margaret dans ENGRENAGES, le cinéaste nous met cette fois-ci à la place de Joe, un jeune et candide ingénieur tout à ses inventions et autres trouvailles scientifiques. Balloté entre plusieurs « âmes charitables », le jeune homme – et, derrière lui, le spectateur – ne sait plus vraiment à qui se fier dans cette histoire tortueuse.
Si, bien sûr, la bienveillance des uns ou des autres nous apparaît trop belle pour être honnête, on s’identifie sans peine au personnage de Joe Ross, jeune homme naïf et proie idéale. Interprété avec conviction par Campbell Scott (UN THÉ AU SAHARA, DEAD AGAIN…), LA PRISONNIÈRE ESPAGNOLE est également composé d’un solide casting dont Ben Gazarra (HUSBANDS, OPENING NIGHT, THE BIG LEBOWSKI…) ou Rebecca Pidgeon (RED, BIRD BOX…).
En tête de ce casting, on reste bluffé par le talent dramatique de Steve Martin, issu du Saturday Night Live des années 70 et plus habitué aux comédies. Parfaitement à l’aise dans un rôle manipulateur, il vole quelque peu la vedette aux autres acteurs, incarnant tour à tour le dandy généreux et le calculateur froid.
Nouvelle pièce maîtresse de David Mamet, LA PRISONNIÈRE ESPAGNOLE est une œuvre complexe et fascinante, nécessitant une attention soutenue pour ne pas perdre le fil du récit… et se faire piéger !
Bande-annonce
David Mamet est sans doute davantage connu par les amateurs de théâtre outre-Atlantique qu’ici comme metteur en scène de cinéma. J’ai vu il y a bien longtemps « la Prisonnière Espagnole » et j’en garde un bon souvenir. Merci pour cette piqûre de rappel qui me guide vers un autre titre semble-t-il tout aussi intrigant.
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De rien. Pour Mamet, c’est sûr que ses films en tant que cinéaste ne sont pas ou peu connus par ici. Il a eu une période plus faste en France pour les scénarios de plusieurs succès dans les années 80 comme Les Incorruptibles. J’aime ses films de réalisateur, classiques et à contre-courant de ce que fait généralement Hollywood.
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