Demandez le programme ! Au menu de ce numéro 42 des chroniques rapido : un buddy movie des années 80, une « rom com » rafraichissante et un thriller d’animation made in Japan.
DOUBLE DÉTENTE (1988) de Walter Hill
Dans les années 80 à Moscou, un an avant la chute du Mur de Berlin, le capitaine de police Ivan Danko (Arnold Schwarzenegger) veut arrêter Viktor Rostavili (Ed O’Ross), un dangereux trafiquant d’armes. Mais ce dernier abat le coéquipier de Danko et s’enfuit aux États-Unis. Ayant retrouvé sa trace, Danko débarque à Chicago où il doit faire équipe avec le sergent Art Ridzik (James Belushi), un flic roublard et grande gueule…
Au cinéma, les années 80 ont vu s’accumuler les « buddy movies » (ou « films de potes » pour la traduction) avec des tandems de flics – ou équivalents – mal assortis et sous toutes les déclinaisons.
On a ainsi vu les duos blanc / black (48 HEURES), vieux flic / chien fou à la sauce blanc / black (L’ARME FATALE) et même humain / alien (FUTURE IMMÉDIAT, HIDDEN). En 1988, alors que la Guerre Froide touche à sa fin, Arnold Schwarzenegger et le réalisateur / scénariste / producteur Walter Hill s’associent pour monter un projet ensemble.
L’acteur d’origine autrichienne connaît la gloire après CONAN LE BARBARE et TERMINATOR. Quant au cinéaste, il s’est fait une spécialité des films d’action « sévèrement burnés » avec des classiques du genre comme LE GANF DES FRÈRES JAMES, LES RUES DE FEU, EXTRÊME PRÉJUDICE ou 48 HEURES précédemment cité.
Schwarzy veut tourner avec Hill qui ne veut pas mettre en scène un film de Science-Fiction (ce qui l’amena d’ailleurs à confier les rênes d’ALIEN à Ridley Scott…). Ce dernier oriente donc leur projet vers le polar et propose à l’acteur d’incarner un officier de police soviétique. Le buddy movie ayant à l’époque les faveurs du public, on associe alors James Belushi, frère cadet de John Belushi et également issu du Saturday Night Live.
DOUBLE DÉTENTE (RED HEAT en VO) débarque en salles au début de l’été 1988. Ça n’est pas un chef d’œuvre, ni le meilleur Schwarzy ou le meilleur Walter Hill. Mais le divertissement « fast food » – vite avalé, vite apprécié – est bien là et satisfait un des spectateurs qui n’attendent rien d’autre. 30 ans plus tard, c’est sûr que le film a vieilli mais il laisse voir si l’on n’est pas trop regardant. Et si l’on est curieux de voir la coupe en brosse « Desireless » d’Arnold !
L’AMOUR EN ÉQUATION (1994) de Fred Shepisi
Dans les années 50 aux États-Unis, à Princeton. Ed Walters (Tim Robbins), un jeune mécanicien, a le coup de foudre pour la belle mathématicienne Catherine Boyd (Meg Ryan) qui doit bientôt se marier. Cherchant à la revoir, Walters rencontre le grand physicien Albert Einstein (Walter Matthau) qui est aussi l’oncle de Catherine…
La comédie romantique – ou « rom com » – s’est imposée au cinéma comme un genre à part entière, offrant le meilleur (QUAND HARRY RENCONTRE SALLY, DIAMANTS SUR CANAPÉ…) comme le pire.
Entre ces deux extrêmes, certaines « rom com » parviennent à s’imposer par la qualité du casting, le soin et la fantaisie apportés au scénario. C’est le cas de cet AMOUR EN ÉQUATION (I.Q. pour la VO). Oubliez le titre français d’une grande mièvrerie et son jeu de mots moisi. Sans être un chef d’œuvre, le film de Fred Shepisi (PLENTY, LA MAISON RUSSIE, CRÉATURES FÉROCES…) est une réussite du genre.
Le récit est certes convenu – deux êtres que tout oppose vont comprendre qu’ils sont fait l’un pour l’autre – mais le contexte est plutôt original. Doté d’une belle reconstitution d’époque, le film est élégant et ne s’égare jamais dans une vulgarité facile.
Comme souvent dans ce genre de films, L’AMOUR EN ÉQUATION nous démontre que rien ne sert de mentir à celui ou à celle que l’on veut séduire. Et que les différences se complètent souvent.
Même si un parfum de « déjà-vu » enveloppe le film de Fred Shepisi, le charme de son duo vedette Meg Ryan / Tim Robbins est suffisamment convainquant pour rendre cette petite sucrerie agréable. Quant à Walter Matthau, il est tellement parfait en Einstein que l’on se demande pourquoi personne ne l’avait jamais engagé avant pour le rôle !
PERFECT BLUE (1997) de Satoshi Kon
Au Japon à la fin des années 90, Mima fait partie d’un « Girls Band » très populaire. Elle décide pourtant de quitter le groupe et sa carrière de chanteuse pour devenir actrice à plein temps. Avec des débuts mineurs et de nombreux fans qui renient ses choix, la jeune femme connait une sérieuse période de doutes et de troubles psychologiques. Elle découvre alors qu’un site web se présente comme son propre journal intime, rempli de détails quotidiens véritables, et que ceux qui perturbent son existence sont tous assassinés dans d’atroces circonstances…
Si pour de nombreux adeptes de l’anim japonaise et du manga en général les œuvres de Katsuhiro Ōtomo (AKIRA) et des studios Ghibli sont au dessus de tout, il ne faut pas mettre de côté les créations de Satoshi Kon. Disparu il y a une dizaine d’années, ce créateur avait choisi un traitement plus réaliste – et plus cru – pour des productions où le fantastique se mêlait au quotidien.
PERFECT BLUE était sa première réalisation et fut diffusé en France en 1999. Véritable critique du monde des médias, de la célébrité qui peut, à tout moment, disparaître comme elle peut détruire les individus à force de détournements des informations et de violations de la vie privée, le film évoque les œuvres de Brian De Palma, de Mario Bava et de Dario Argento (récemment cité dans le blog dans la chronique #41).
Rappelant par son atmosphère les Giallos – ou Gialli, vous corrigerez vous-même… – des années 60/70 par ce mélange de violence et d’érotisme en milieu urbain, PERFECT BLUE ne cherche pas à flatter l’œil et les sens bien que son traitement visuel et graphique soit des plus soignés. La mise en place des différents protagonistes et décors du film est rapidement exécutée, plaçant le spectateur au cœur d’un récit cauchemardesque et angoissant.
Le doute sur la fragilité mentale de Mima est constamment entretenu, tout comme ces limites de plus en plus fragiles entre la fiction et la réalité, nous faisant douter de la personnalité la jeune femme jusqu’au bout du film. Suivie – voire poussée – par deux agents qui n’ont pas les mêmes objectifs quant à la carrière de leur « protégée », Mima est plongée dans une vertigineuse descente aux enfers afin d’accéder à un vedettariat tant désiré. Au point que son personnage de tueuse en série d’un feuilleton à succès et les crimes commis dans la réalité semblent ne plus former qu’une seule et même vérité. À moins que…
Mais ne comptez pas sur moi pour vous « divulgacher » PERFECT BLUE. Œuvre glaçante mais intrigante, ce film d’animation mérite amplement d’être (re)découvert.