En v’là de la chronique rapido, en v’là… Au sommaire de ce 48ème numéro : un Hubert à Bahia, une parodie des buddy movies et un polar dans les polders.
FURIA À BAHIA POUR OSS 117 (1965) d’André Hunebelle
Dans les années 60, alors qu’il s’adonne aux plaisirs des sports d’hiver, l’agent-secret Hubert Bonnisseur de la Bath dit OSS 117 (Frederick Stafford) est rappelé pour une mission urgente au Brésil. Plusieurs hommes politiques du pays ont été assassinés dans des attentats suicides. Sur place, il fait la rencontre de la belle Anna-Maria Sulza (Mylène Demongeot) et du milliardaire Leandro (Raymond Pellegrin)…
Avant de devenir une série de comédies au ton décalé avec Jean Dujardin, la collection des OSS 117 était une suite de romans d’espionnage initiée par Jean Bruce à la fin des années 40, puis adaptée en France au début des années 60 par André Hunebelle, futur réalisateur des FANTÔMAS avec Louis de Funès et Jean Marais. On retrouve d’ailleurs certains acteurs et membres du casting dans les OSS (comme Raymond Pellegrin la voix de Fantômas, Dominique Zardi ou le compositeur Michel Magne).
L’acteur américain Kerwin Mathews – vu dans plusieurs productions aux sfx signés Ray Harryhausen – interprétera l’agent-secret dans OSS 117 SE DÉCHAÎNE (1963) et BANCO À BANGKOK POUR OSS 117 (1964). Puis, face à ses prétentions salariales montantes, les producteurs décidèrent de le remplacer. Hunebelle venait de rencontrer l’autrichien Frederick Stafford, belle stature à la Sean Connery… mais représentant en pharmacie et piètre acteur selon les dires de sa partenaire Mylène Demongeot !
FURIA À BAHIA le confirme : Stafford a de la prestance mais son sourire figé et « automatique » lorsqu’il se joue des méchants est à mourir de rire, transformant le film en comédie involontaire ! Les répliques prêtent elles aussi à sourire. Et la surprise est de retrouver certains dialogues au mot près utilisés dans les OSS de Dujardin, tel le fameux « Je ne dis cela qu’aux brunes aux yeux noirs / marrons… » que Frederick Stafford déclame à Perrette Pradier avec son sourire fluoré ! Hommage ou plagiat des versions récentes ? À voir…
Reste que FURIA À BAHIA est une série B des plus distrayantes, à prendre avec du recul. Mylène Demongeot y est à croquer, les décors naturels du Brésil font éclater les couleurs et, si l’intrigue est « abracadabrantesque » comme bon nombre de récits d’espionnage des années 60, James Bond y compris, le film fait passer un bon moment en pleine grisaille.
HOT FUZZ (2007) de Edgar Wright
Nicholas Angel (Simon Pegg) est un policier londonien, dévoué corps et âme à son métier. Faisant de l’ombre à ses collègues trop tranquilles, il est muté dans une petite ville de la campagne anglaise, réputée pour sa tranquillité. Très vite mis-à-l’écart par l’ensemble du commissariat local, il parvient à sympathiser avec Danny Butterman (Nick Frost), policier débonnaire et candide. Mais une série de crimes étranges vient bientôt secouer la région…
Les geeks / cinéphiles connaissent déjà ce que l’on nomme communément la « Trilogie Cornetto » ou « Blood And Ice-Cream Trilogy ». Lancée par les acteurs Simon Pegg (MISSION : IMPOSSIBLE, STAR TREK…) et Nick Frost (GOOD MORNING ENGLAND, PAUL…) avec le réalisateur Edgar Wright (BABY DRIVER) derrière la caméra, cette série de trois films, comprenant SHAUN OF THE DEAD (2004), HOT FUZZ (2007) et LE DERNIER PUB AVANT LA FIN DU MONDE (2013), détourne à chaque segment les films de genre : zombie, action / buddy movie et science-fiction / invasion d’aliens.
La présence des glaces Cornetto dans chacun des 3 films est devenu la « marque de fabrique » de la trilogie, en plus des acteurs réguliers et de quelques participations amicales comme celle de Bill Nighy (PIRATES DES CARAÏBES, INDIAN PALACE, IL ÉTAIT TEMPS…).
HOT FUZZ (FUZZ étant un mot d’argot désignant la police) est un détournement « so british » des films d’action US comme DIE HARD ou BAD BOYS. Une comédie policière saignante ou un duo de flics, n’ayant rien en commun, improvise un tandem de choc pour s’opposer aux méchants. La rencontre improbable de L’ARME FATALE et de L’INSPECTEUR BARNABY !
Agrémenté de « special guest stars » qui prennent, apparemment, le même plaisir que Pegg et Frost à dynamiter les clichés de l’actionner américain – Timothy Dalton, Paul Freeman, Bill Nighy, Edward Woodward et Cate Blanchett – HOT FUZZ est un beau délire politiquement incorrect et généreux.
Les références aux classiques du genre sont multiples (comme ce plan à la Michael Bay ou cette parodie de POINT BREAK) et le film se déguste sans temps morts. Hautement recommandé, à voir ou revoir pour se décontracter les zygomatiques !
LA PEAU DE BAX (2015) de Alex van Warmerdam
De nos jours aux Pays-Bas. Schneider (Tom Dewispelaere) est un tueur à gages efficace. Mais il est aussi un mari et père de famille dévoué. Le jour de son anniversaire, on lui confie une mission simple en apparences : exécuter Ramon Bax (Alex van Warmerdam), un écrivain vivant isolé dans une petite maison dans les marais. Mais une série d’imprévus va compliquer la mission du tueur…
Les diffusions de raretés et d’inédits sur le câble offrent parfois de bonnes surprises. Comme LA PEAU DE BAX, curieux polar hollandais, entre comédie, thriller saignant, étude de mœurs et documentaire naturaliste. Entre Tarantino et Terrence Malick.
Film épuré à la photographie soignée, dénué de BO inutile, LA PEAU DE BAX jongle entre les genres, alignant les séquences inattendues avec des plans contemplatifs sur les superbes marais hollandais. Une manière de présenter ce petit théâtre sanglant et corrosif avec le recul suffisant pour mieux ridiculiser les protagonistes du récit.
Des hommes et des femmes s’y déchirent au propre comme au figuré. Alors qu’il s’apprête à commettre un crime, Schneider le tueur reçoit l’appel de son épouse (ignorant tout de ses activités) pour lui demander s’il préfère du poisson ou de la viande pour son repas d’anniversaire !
De son côté, Bax « l’écrivain » borderline a la visite surprise de l’une de ses filles, en pleine dépression et bien plus psycho rigide que son père consommateur de drogues en tous genres ! D’autres personnages inattendus vont semer le trouble au cours de la journée, entraînant le chaos alors que la nature environnante est d’une beauté lumineuse.
Du polar classique à la comédie grinçante en passant par le drame familiale, LA PEAU DE BAX captive en prenant les chemins de traverse, se débarrassant de toutes explications superflues pour nous offrir quelques surprises et des moments décalés.
L’acteur et cinéaste Alex van Warmerdam s’amuse à brouiller les cartes et se permet un regard ironique sur les rapports humains, faits de violence contenue et de non-dits fatals sous le couvert de l’éducation et des politesses inutiles. Original, futé et décalé.