Revoir LE CIEL PEUT ATTENDRE

Pas question de trouver de fausses bonnes excuses pour manquer le Ciné Club du Bric-à-Brac de Potzina ! Vous savez, dans le style “je ne peux, j’ai piscine !”. Quoique… Avec pour thème « le sport au cinéma », je restais dans le sujet. À nouveau, avec un fil conducteur en plein dans l’actualité, je n’avais que l’embarras du choix. De ROCKY et la boxe aux CHARIOTS DE FEU sur les Jeux Olympiques en passant par LE MANS et la course automobile, le plus difficile était de me décider. L’idée – pas si neuve, j’en conviens – de prendre les chemins de traverse pour aborder ce nouveau thème s’est tranquillement mis en place dans ma tête : LE CIEL PEUT ATTENDRE de et avec Warren Beatty, comédie fantastique et romantique, à la fois légère et grave, ferait l’objet de cette chronique.

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Fantastique, tendre et loufoque

LE CIEL PEUT ATTENDRE, réalisé et interprété par Warren Beatty en 1978, n’est pas à confondre avec le film de Lubitsch du même nom (du moins en VF). Sorti à contre-courant en plein période disco et SF, le film raconte les mésaventures d’un joueur de football américain, Joe Pendleton (Warren Beatty), envoyé ad patres trop tôt par la faute d’un ange zélé. Il lui faut absolument regagner le monde des vivants puisqu’un match décisif pour son équipe l’attend dans quelques jours.

Mais l’administration du Paradis ne peut le renvoyer dans son propre corps et lui propose de réintégrer sa vie… par le biais d’un corps d’emprunt ! Exit le jeune quaterback sportif et exalté : Pendleton ressuscite dans la peau d’un vieux milliardaire, Leo Farnsworth, que sa femme Julia (Dyann Cannon) et l’amant de celle-ci Tony Abbott (Charles Grodin) ont tenté d’éliminer ! Pour nous, spectateurs, il conserve son apparence mais, dans le film, il est aux yeux de tous un capitaine d’industrie de 70 ans curieusement soucieux de participer au Super-Bowl ! Ne pensant qu’à la compétition, Joe, sous les traits de Farnsworth, rencontre Betty Logan (Julie Christie), une militante écologiste dont il va tomber amoureux…

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Comédie fantastique tendre et loufoque, LE CIEL PEUT ATTENDRE joue bien entendu sur un comique de quiproquos et de situations décalées. Première réalisation de Warren Beatty, aidé de Buck Henry (comédien et scénariste entre autres sur LE LAURÉAT), le récit procure une très agréable sensation de légèreté où pointe parfois quelques touches d’émotion et de réflexion. Fable sur les hasards de l’existence et sur la possibilité d’une seconde chance, le film reçut 3 Oscars en 1979 : meilleur acteur, meilleur réalisation et meilleur film. Pour un coup d’essai…

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Une pièce de théâtre plusieurs fois adaptée au cinéma

À l’origine du film, il y a une pièce de théâtre des années 30, écrite par Harry Segall, un auteur et scénariste à Hollywood. La pièce est adaptée une première fois en 1941 sous le titre LE DÉFUNT RÉCALCITRANT. Puis, après la version de 1978, elle inspire un nouveau film, LES PIEDS SUR TERRE, en 2001.

Dans l’histoire originale de Harry Segall, le personnage principal était un boxeur. Lorsqu’il souhaite adapter la pièce au cinéma pour en faire son premier film de cinéaste, Warren Beatty songe un temps proposer le rôle central à Cassius Clay / Mohamed Ali. Mais ce dernier n’est pas disponible. Beatty décide de jouer le personnage de Joe et ses scénaristes remanient le synopsis pour placer la trame dans le monde du football américain.

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Si Warren Beatty s’offre la vedette en plus de co-réaliser et produire le film, il n’oublie pas pourtant de s’entourer d’excellents acteurs à qui il offre de très beaux rôles. James Mason (LA MORT AUX TROUSSES, LOLITA…) incarne M. Jordan, l’administrateur du Paradis et l’équivalent « so british » de Saint-Pierre. Le sympathique Jack Warden (12 HOMMES EN COLÈRE, LES HOMMES DU PRÉSIDENT…) joue le rôle de Max, l’entraîneur déboussolé de Pendleton qui est le seul à connaître la vérité.

Dyan Cannon (LE CASSE, PIÈGE MORTEL…) et Charles Grodin (CATCH 22, KING KONG 1976, MIDNIGHT RUN…) sont les amants ridicules et assassins amateurs. Quant à celle pour qui craque le cœur de Pendleton, la déterminée Betty Logan, elle est interprétée par la belle Julie Christie (LE Dr JIVAGO, FARENHEIT 451, CHALEUR ET POUSSIÈRE…) qui fut un temps la compagne de Warren Beatty.

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Humour, amour et réflexion

Adaptée avec un humour tout en finesse et un ton mêlant tendresse et burlesque par Beatty, Elaine May et Robert Towne, LE CIEL PEUT ATTENDRE conserve le rythme d’une pièce de théâtre dans les réparties des personnages, sans pour autant être statique. Armé d’un saxophone soprano (oui, j’ai fait des recherches…) qui l’aide à passer ses nerfs… mais dont les sonorités abominables qu’il en tire ruinent la patience de son entourage, le personnage de Joe devient le chien dans un jeu de quilles en bouleversant de son attitude franche et directe le monde des affaires qui lui est totalement étranger.

Jouant sur un humour digne des comédies Hollywoodiennes classiques, Beatty réalise quelques séquences d’anthologie comme l’entraînement de Joe / Farnsworth face à ses équipiers médusés, son comportement désinvolte devant sa femme et son amant au bord de la crise de nerfs, ses conversations avec les envoyés du Ciel – qu’il est bien sûr seul à voir – dans un placard…

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Pas besoin pour suivre le film d’être un expert en football américain. Le sport est ici une toile fond qui permet de jouer sur les différences entre le monde d’origine de Joe Pendleton et celui du milliardaire Farnsworth. Ce décalage entraîne des situations délirantes. Mais au centre de ce récit d’humour, LE CIEL PEUT ATTENDRE offre aussi une belle réflexion sur les choix d’une vie et ses conséquences.

Si les personnalités de Joe et Farnsworth sont différentes, les deux hommes se rejoignent quelque peu sur leurs obsessions communes. Le milliardaire ne songeait qu’à ses gains quand Pendleton ne pense qu’à son match. Tous les deux sont probablement passés à côté de leurs vies respectives lorsque le personnage de Julie Christie / Betty vient bouleverser cet état des lieux.

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L’amour que voue Joe à Betty le rend meilleur et, indirectement, rachète la personnalité égoïste de Farnsworth. Ça n’est que mon interprétation, bien sûr, mais je suis persuadé qu’au delà de la comédie et du ton décalé du film, LE CIEL PEUT ATTENDRE est également une simple et belle histoire sur ce qui nous pousse à vivre, sur ce qui nous motive.

Brillant et léger (en apparence) comme des bulles de champagne, le film de Beatty est devenu au fil des années un grand classique et fut classé en 2006, par le magazine Première US, comme l’une des 50 meilleures comédies de tout les temps.

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Cet article fait partie du Ciné-Club de Potzina à découvrir d’urgence en cliquant ce magnifique lien juste fait pour vous, bande de veinards !!


LE CIEL PEUT ATTENDRE (1978) de Warren Beatty et Buck Henry.
Avec Warren Beatty, Julie Christie, James Mason, Jack Warden, Dyan Cannon, Charles Grodin, Buck Henry…
Scénario : Elaine May, Warren Beatty et Robert Towne d’après une pièce d’Harry Segall.
Musique : Dave Grusin.

Crédits photos : © Paramount Pictures.


Bande-annonce

3 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. potzina dit :

    Hou là là ! Ton billet me met la bave aux lèvres et la bande-annonce en remet une couche 😀 Je n’ai jamais vu ce film mais je vite palier ce manque !
    Merci pour la découverte et pour cette très beau billet mon Huggy 🙂

    Aimé par 1 personne

    1. Merci ma Potzi ! Je me répète mais là, je suis persuadé que le film devrait beaucoup te plaire. C’est le genre de film qu’il faudrait pour tout le monde en ce moment, à la fois grave et léger. Une comédie sans vulgarité, tendre et parfois complètement barré… mais très attachante !

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