Pour une poignée de films… #23

Au menu de cette chronique expresso n°23, du Spielberg instructif mais amidonné, du très bon thriller journalistique au casting impliqué et du super-héros transparent pour ados.


LE PONT DES ESPIONS (2015) de Steven Spielberg

Au début des années 60, en pleine Guerre Froide, peu de temps après la construction du Mur de Berlin, l’avocat James Donovan (Tom Hanks) est mandaté par la CIA pour mener à bien un échange entre un espion soviétique et un pilote de l’air américain…

Fan de Steven Spielberg depuis toujours, il y a pourtant deux choses qui m’agacent parfois chez ce boulimique cinéaste : son excès de classicisme, dans certains cas, et son besoin d’être encore reconnu comme un grand metteur-en-scène auprès du public et de la profession.

Pour ce qui est de la reconnaissance, on sent chez Spielberg cet indéniable besoin d’être aimé malgré plus de 40 ans de succès et un engouement mondial pratiquement sans failles. Depuis le milieu des années 80, avec LA COULEUR POURPRE, il y a chez le cinéaste de JAWS comme un besoin de prouver qu’il n’est pas qu’un « magicien » du divertissement grand public.

Certes, LE PONT DES ESPIONS n’est pas un mauvais film pour autant, ni même un mauvais Spielberg. Bénéficiant d’une superbe reconstitution historique et d’acteurs talentueux – Tom Hanks en tête – le film revient sur un pan de notre histoire (relativement) récent, avec le récit de l’avion espion américain U2 abattu au dessus du territoire soviétique en 1960.

Mais dans ses aspects didactiques, LE PONT DES ESPIONS pourra sembler long par moments et un rien scolaire. Instructif à défaut d’être entièrement passionnant, le film donne le sentiment d’un docu-fiction destiné à un débat télévisé. Peut-être une belle initiative à l’égard d’un certain public américain en manque de repères historiques. Mais une œuvre trop classique pour m’avoir vraiment enthousiasmé.


SPOTLIGHT (2015) de Tom McCarthy

En 2001, un groupe de journalistes d’investigation, travaillant pour un quotidien de Boston, enquête sur un cas de pédophilie dans le milieu ecclésiastique. Pensant relancer un fait-divers sordide, l’équipe de Spotlight met à jour un immense scandale…

Lorsqu’un film commence en signalant qu’il est inspiré de faits réels, comme un DTV  diffusé sur M6, ça ne présage rien de bon en général. Spotlight est l’exception qui confirme la règle : sobre, impliqué et prenant de bout en bout, le brûlot de Tom McCarthy est une œuvre nécessaire.

Revenant sur des faits récents survenus aux États-Unis, Spotlight pourrait se dérouler en France ou ailleurs dans le monde, tant ces cas immondes impliquant curés et autres instances religieuses sont devenus légion ces dernières années. Le film nous rappelle, si c’était nécessaire, que tout cela ne date pas, hélas, d’aujourd’hui.

SPOTLIGHT évoque LES HOMMES DU PRÉSIDENT dans son traitement global. Soutenu par une belle distribution – Liev Schreiber et Mark Ruffalo en tête – le film secoue les consciences sans verser dans le racolage putassier. Construit comme un thriller politique sans effets superflus, le film de Tom McCarthy présente, en parallèle, le quotidien de journalistes humbles et soudés face à un système hypocrite.

Ville aux origines irlandaises, et donc de religion essentiellement catholique, SPOTLIGHT met également à jour, au détour de certaines scènes, les relents antisémites de grosses huiles en place, le comportement douteux d’avocats corrompus et le silence général d’une population qui préfère fermer les yeux et se taire.

Sans temps morts et nécessaire, SPOTLIGHT est un très bon polar social à ne pas manquer.


SPIDER-MAN : HOMECOMING (2017) de Jon Watts

Coaché par Tony Stark / IronMan en personne (Robert Downey Jr), le jeune Peter Parker / Spider-Man (Tom Holland) aimerait impressionner son mentor et rejoindre l’équipe des Avengers. Il va pouvoir faire ses preuves alors que New-York subit les assauts répétés d’un gang de voleurs mené par Adrian Toomes alias Le Vautour (Michael Keaton)…

« L’Arraignée est un être bien singulier » dit la chanson. Pourtant, depuis 2002, pas moins de 6 films en 15 ans sont sortis sur grand écran, avec 3 interprètes différents. Problèmes de droits arrivant à terme amenant, pour le meilleur et pour le pire, à la prolifération des Tisseurs…

Revenu à la maison-mère Marvel en ce qui concerne ses aventures cinématographiques – d’où le « colossal » clin d’œil du titre – Spidey connaît donc ici une nouvelle interprétation, après la réussite de la trilogie de Sam Raimi et le plantage du diptyque de Marc Webb. Inclus à présent dans le puissant « Marvelverse ». Qu’en est-il au final de la version réalisée par Jon Watts ?

SPIDER-MAN : HOMECOMING a au moins le mérite de ne plus nous présenter les origines du jeune super-héros. Le récit est censé se dérouler peu de temps après la découverte de ses nouveaux pouvoirs par Peter Parker et sa « prise en charge » par Tony Stark, reliant le film à CAPTAIN AMERICA : CIVIL WAR où l’Arraignée avait fait une apparition remarquée.

Plaçant son héros sympathique dans une ambiance digne de « Sauvés par le gong », avec une Tante May très (trop) rajeunie (Marisa Tomei en cameo guest-star), SPIDER-MAN : HOMECOMING prend le risque de désarçonner les fans de la première heure pour s’attirer un public essentiellement adolescent.

Malgré la présence routinière de Robert Downey Jr, le jeu rafraîchissant de Tom Holland et le plaisir évident chez Michal Keaton à jouer les méchants (avec circonstances atténuantes), le film de Jon Watts se regarde sans passion. Comme un téléfilm de luxe sans réelles ambitions si ce n’est de faire revenir un personnage iconique de la « maison aux idées » dans ses locaux d’origine. Soit un objectif commercial et stratégique trop évident pour susciter une réelle empathie, digne du personnage. Et cette pénible sensation d’indigestion face au trop plein de films de super-héros.

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