Batman se fait une toile #1

Grand fan du personnage et à l’occasion de son 80ème anniversaire cette année, je vous propose un dossier en 4 parties consacré aux adaptations de Batman sur grand écran, du début des années 40 jusqu’à nos jours.

Pour l’épisode 1 de cette chronique, partons des premiers serials en noir et blanc jusqu’à la Batmania des années 60. Let’s go to the Batmobile !

L’époque des serials : 1943 – 1949

Une affiche pour le serial Batman de 1943…

Loin de moi l’idée de vous fait faire un historique du justicier de Gotham City. Mais il est toujours bon de replacer le contexte d’une création en quelques mots.

Le croisement entre la fin des années 30 et le début des années 40 marque ce que l’on nomme aujourd’hui « l’âge d’or » des comics américains : Superman en 1938, Batman en 1939 et Wonder Woman en 1941 représentent encore le trio iconique de la BD d’outre-atlantique, toutes maisons d’édition confondues.

Un an après la création de Superman par Joe Shuster et Jerry Siegel, les éditions DC Comics lancent un nouveau personnage de justicier, double sombre et masqué du dernier fils de Krypton. La création de Batman – librement inspiré du personnage de Zorro et lui empruntant plusieurs attributs comme la double identité play-boy oisif / héros masqué, la cave secrète, le cosrume sombre… – est due elle aussi à un duo : Bob Kane au dessin et, on l’oublie trop souvent, Bill Finger au récit. C’est d’ailleurs Finger qui souffla à Kane l’idée de la chauve-souris, inspirée par un dessin de Léonard De Vinci.

Loin de se faire concurrence, les personnages de Superman et Batman sont des succès des kiosques auprès d’un lectorat amateurs d’évasion et de feuilletons. Et qui dit feuilleton dit « serial » : en cette époque du début des années 40 où la télévision n’a pas encore envahi les foyers américains, le principe du serial consiste en une série de films au format moyen (45 à 50 minutes) proposant une histoire complète sur quelques épisodes.

Véritable ancêtre de nos séries tv actuelles, le serial connaît de beaux jours avec des récits policiers mais aussi de la science-fiction et des adaptations de comics comme FLASH GORDON / GUY L’ÉCLAIR.

Lewis Wilson sous les collants de Batman…

En 1943, Batman et. Robin, jeune sidekick du justicier de Gotham City, vont faire l’objet d’une première adaptation sur grand écran sous la forme d’un serial sobremment intitulé BATMAN (THE BATMAN pour la VO). L’absence de super pouvoirs du duo de personnages, en comparaison de leurs collègues de chez DC Comics, nécessitant des effets séciaux et des moyens financiers plus importants, est probablement liée au choix de la Columbia Pictures, productrice des films.

Ce 1er serial , segmenté en 15 chapitres, marquera une étape importante dans l’évolution de Batman  et de son univers. Il y a, entre autres, l’apparition de la base secrète du héros, connue plus tard sous le nom de Batcave, et l’aspect « définitif » du personnage d’Alfred Pennyworth, le majordome britannique de Bruce Wayne / Batman, devenu mince et moustachu là où le personnage est encore rondouillard et glabre dans le comics.

Mais ces premières aventures sur grand écran du « caped crusader » ne sont pas dénuées de défauts, imputables à l’époque de la Seconde Guerre Mondiale et aux petits moyens octroyés. Les États-Unis sont alors en guerre contre le japon et un racisme anti-nippon est considéré comme de rigueur. Les ennemis de Batman et Robin sont de fourbes espions de l’Empire du Soleil Levant et il n’est pas question de s’encombrer de nuances lorsque l’on s’adresse à eux.

Lewis Wilson, premier interprète de Batman / Bruce Wayne au cinéma…

Pas question non plus d’investir de gros budgets dans la production. Bye-bye la Batmobile : Batman et Robin utilisent ainsi le même véhicule à la ville comme dans leur croisade masquée contre le crime ! Ce qui est plutôt gênant si on veut passer incognito pour combattre ses ennemis…

Involontairement drôles, les costumes de nos héros, tout en plis disgrâcieux et oreilles tombantes, ont (très) mal traversé les années et prêtent à sourire aujourd’hui.

Slips géants et masques en feutrine pour Lewis Wilson et Douglas Croft en 1943…

Acteur inconnu en France, Lewis Wilson fut le premier interprète de Batman / Bruce Wayne au cinéma. Avec une courte carrière interrompue peu de temps après le serial de 1943, il est aujourd’hui connu pour avoir été le premier époux de Dana Broccoli et être le père de Michael G. Wilson, l’un des actuels producteurs de la série des James Bond. À ses côtés, sous le masque de Robin / Dick Grayson, Douglas Croft, âgé de 16 ans lors du tournage, était ce que l’on nommait à l’époque un enfant acteur, au même titre que Shirley Temple ou Mickey Rooney.

Ressorti dans les années 60 sous le titre AN EVENING WITH BATMAN AND ROBIN puis édité en vidéo dans les années 80 dans une version « édulcorée » (comprenez : sans ses connotations racistes), ce serial de 1943 fut réédité dans sa version originale dès les années 90.

Affiche du second serial de 1949…

6 ans plus tard, un second serial fut produit par la Columbia. Nommée THE NEW ADVENTURES OF BATMAN AND ROBIN THE BOY WONDER – ou plus simplement BATMAN AND ROBIN – cette nouvelle série en 15 segments était interprétée par deux nouveaux acteurs, respectivement Robert Lowery pour Batman / Bruce Wayne et Johnny Duncan pour Robin / Dick Grayson. Également inconnus chez nous, Lowery joua principalement dans des séries B d’action et d’aventures alors que Duncan eut un rôle dans le nanar mythique PLAN 9 FROM OUTER SPACE d’Ed Wood.

À nouveau, pour cette version de 1949, le budget n’était pas au rendez-vous : costumes aproximatifs et ridicules, une Mercury en guise de véhicule après la limousine de 1943… Ce serial multiplie les faux-raccords et les incohérences, comme un Bat-signal projeté en plein jour !

S’éloignant du racisme primaire du premier serial, tourné en plein conflit mondial, ces nouvelles aventures de Batman le voit cette fois affronter un savant fou, inventeur d’une machine contrôlant les véhicules à distance. À noter que BATMAN AND ROBIN inclue le personnage de la journaliste Vicky Vale, au casting du film de Tim Burton en 1989 sous les traits de Kim Basinger…

Robert Lowery et Johnny Duncan, les Batman et Robin de 1949…

Jamais distribués en France en vidéo, ces serials des années 40 sont exploités en DVD pour le marché américain depuis le milieu des années 2000. Ils constituent aujourd’hui une véritable curiosité à destination des Bat-fans de la première heure et autres collectionneurs.

 

La Batmania des 60’s

La fin des années 40 marque une double étape pour le personnage de Batman : la fin progressive des serials au cinéma avec l’arrivée de la télévision et la traversée d’un « désert imaginatif » quant aux comics.

Marqués par la fin de la Seconde Guerre Mondiale où ils représentaient une source inépuisable de divertissement, les super-héros n’ont plus la côte auprès du public. L’arrivée du  Comics Code Authority en 1948, dérivé du tristement célèbre Code Hays Hollywoodien et à l’origine de limitations très strictes sur la BD américaine jusqu’en 2011 va influencer en mal les aventures de Batman.

Adam West sous le masque de Batman en 1966…

Afin de ne pas heurter la sensibilité du jeune public, le justicier de Gotham y affronte des créatures de l’espace, s’habille de Bat-costumes aux teintes flashys ou adopte un (Bat)chien comme son collègue Superman et son fidèle Krypto !

Le personnage va ainsi connaître une période en demi-teintes jusqu’aux années 60. En 1966, l’acteur et producteur William Dozier va initier une véritable Batmania en créant pour le téseau télévisé ABC une série de 3 saisons d’épisodes de 25 minutes.

Sobrement intitulé BATMAN, cette relecture pop et loufoque du super-héros sera diffusé sur le petit écran en raison de son coût important pour l’époque et malgré de mauvaises projections tests. Mais contre toute attente, BATMAN est un succès d’audience dès sa première diffusion.

Un appel sur le Batphone pour Batman (Adam West) et Robin (Burt Ward)…

L’époque « peace and love » de la fin des années 60 influence grandement le personnage de Bill Finger et Bob Kane : les couleurs sont criardes, on s’y affronte à grand renfort d’onomatopées apparaissant à l’écran et la mode des Bat-gadgets – dont un répulsif anti-requin – atteint son apogée. Avec le temps, certains y verront même des influences crypto-gays.

Catwoman (Julie Newmar), l’Homme-Mystère (Frank Gorshin), le Pingouin (Burgess Meredith) et le Joker (Cesar Romero)

On parle pour la première fois de « Batmania » tant auprès du public international que du milieu hollywoodien. Des acteurs célèbrent affrontent nos héros en endossant les cosrumes des célèbres ennemis du comics d’origine : Cesar Romero en Joker, Burgess Meredith en Pingouin, Eli Wallach en Mister Freeze, Vincent Price en Crâne d’Œuf, Julie Newmar ou Eartha Kitt en Catwoman, Frank Gorshin ou John Astin pour l’Homme Mystère… Le duo dynamique est bientôt rejoint par Batgirl / Barbara Gordon, interprétée par Yvonne Craig.

La mythique Batmobile des années 60…

Véhicule devenue culte depuis 50 ans, une Batmobile est réalisée pour la série par le designer George Barris. Celui-ci s’inspira d’une Lincoln Futura de 1955, modèle au pare-brise atypique, pour sa Batmobile. Alors que d’autres véhicules (Batboat, Batcopter…) furent réalisés pour la série, la Batmobile devint l’une des miniatures Corgi Toys les plus vendues au monde et demeure l’un des modèles favoris des collectionneurs.

To the Batmobile… let’s go !

La production d’un long-métrage diffusé en salle en 1966 se concrétise, entre la fin de la 1ère saison et le début de la deuxième saison. Initialement envisagé comme un pilote pour la série, le film, simplement intitulé BATMAN et réalisé par Leslie H. Martinson, reprend le ton décalé et le duo vedette Adam West (Batman / Bruce Wayne) et Burt Ward (Robin / Dick Grayson) de la série télé.

Comme la série, le long-métrage est un succès. Mais en 1968, après 3 saisons, l’usure se fait sentir. Le public ne suit plus et le programme de William Dozier est arrêté. Adam West et Burt Ward vont être associés à vie à leurs personnages. Ils doubleront Batman et Robin dans un cartoon de 1977 et reprendront leurs costumes dans le téléfilm LES LÉGENDES DES SUPER-HÉROS en 1978.

L’affiche du film sorti en salles entre les saisons 1 et 2 de la série tv…

West fut même un temps envisagé pour reprendre le smoking de James Bond dans LES DIAMANTS SONT ÉTERNELS et il fut la voix original du Grey Ghost dans la mythique série animée BATMAN des années 90.

En 2002, Burt Ward et Adam West participèrent au film réunion RETURN TO THE BATCAVE aux côtés d’autres acteurs d’origine comme Frank Gorshin. En 2016, BATMAN : LE RETOUR DES JUSTICIERS MASQUÉS, un téléfilm d’animation distribué en vidéo, est produit avec les voix de Julie Newmar, West et Ward.

Batman et Robin 66 en version animée…

Si cette Batmania des années 60 ne s’est toujours pas éteinte depuis plus de 50 ans, malgré son ancrage à une certaine époque et, entre autres, la disparition d’Adam West en 2017, les multiples rediffusions à la télévision de la série et l’avènement de la « Geek Generation », avec le culte des produits dérivés et des conventions spécialisées ont contribué à attiser la flamme.

Toutefois, il faudra attendre une trentaine d’années, au milieu des années 80, avec l’impact d’un comics Batman devenu légendaire, pour qu’un retour de Batman au cinéma soit envisagé.

Une récente gamme de figurines pour collectionneurs nostalgiques…

 

Fin de la 1ère partie. Mais les aventures de Batman sur grand écran sont loins d’être terminées ! À suivre…

Retrouvez les 3 autres parties de la saga Batman au cinéma :

• Batman se fait une toile #2

• Batman se fait une toile #3

• Batman se fait une toile #4

5 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. princecranoir dit :

    C’était l’époque où Batman n’avait pas un excellent tailleur 😀
    Les méchants avaient presque plus de gueule, notamment le génial Burgess Meredith en Pingouin ou même Otto Preminger en Mr Freeze!

    Aimé par 1 personne

  2. C’est sûr 😁 Mais le côté décalé était voulu. Batman a traversé les années 50 et 60 avec des comics délirants et colorés. Les années 70 vont le ramener à plus de sérieux et de noirceur. À suivre sur le blog 😉…

    J’aime

Laisser un commentaire